samedi 18 janvier 2014

REPRISE DE LA SOTEXKA ET DE LA SOTIBA


 500 millions réclamés  à Serigne Mboup 

La banqueroute de l’ancienne  usine textile  de Pikine a plongé prés de 253 ex-employés et leurs familles dans la misère.  Plus de  onze ans après,  ils n’arrêtent pas de  réclamer au repreneur  le paiement du reliquat de 40% de leurs droits.

Les ex-travailleurs de la Société des tissus  de blanchiment et d’apprêt /Société d’impression africaine (SOTIBA/SIMPAFRIC) ne sont pas contents du tout de l’homme d’affaires Serigne Mboup, président de la Chambre de commerce de Kaolack. Et pour cause, ils reprochent à ce dernier d’avoir fait main basse sur prés de 500 millions de francs représentant l’ensemble de leurs droits. En octobre 2010,  il est choisi par le gouvernement d’alors comme repreneur de  l’actif et du passif de la SOTIBA-SIMPAFRIC et de la Société textile de Kaolack (SOTEXKA) des cendres desquelles, il a fondé une nouvelle entité : Domaine industriel textile de Kahone-Saloum (DOMITEXKA-Saloum). D’après les termes du protocole d’accord signé, entre d’une part l’Etat du Sénégal, l’administrateur général de la société DOMITEXKA, les travailleurs de la SOTIBA SIMPAFRIC et les ex-travailleurs de la SOTEXKA et dont nous avons une copie, le repreneur devait « traiter en priorité  le dossier du passif social » des ex-employés des usines textiles en faillite, avant de relancer la production. En clair, DOMITEXKA-SALOUM s’était engagé à payer les arriérés  et droits de retraite à tous les ex-travailleurs de la SOTIBA ayant atteint l’âge légal au moment de la signature de l’accord, à liquider  les droits et arriérés de tous les ex-travailleurs de la SOTEXKA et la SOTIBA-SIMPAFRIC.

 En contrepartie, de la prise en charge du passif social des travailleurs des deux sociétés, le gouvernement s’engageait «à accompagner  le repreneur pour l’obtention et la cession de certains actifs ». Il s’agit, en l’occurrence, de deux titres fonciers dont l’un est immatriculé : TF 78/DP est aujourd’hui muté au nom de la Société nationale de recouvrement (SNR) et l’autre non immatriculé attenant au site industriel  de la SOTIBA.  De même à l’instar des anciens repreneurs de la SOTEXKA, l’Etat promettait de faire bénéficier à DOMITEXKA-Saloum  des exonérations de droits et taxes sur ses investissements matériels et matières premières importées, dans le cadre des agréments  normalement concédés par l’APIX pour les projets industriels.

UN MILLIARD A SERIGNE MBOUP

Joignant l’acte à la parole, 48 heures seulement après la signature de ce protocole d’accord sous la supervision de l’ancien ministre des Mines, de l’industrie, de l’agro-industrie et des PME, Abdoulaye Baldé le Trésor public  effectue trois virements de crédits pour DOMITEXKA de Serigne Mboup dans un compte de la société logé à la BICIS. C’était le 11 octobre 2010 exactement. Le lendemain 12 octobre, le PDG du groupe CCBM, Serigne Mboup en personne  procède au retrait intégral du milliard de francs CFA versé dans ce même compte  sans pour autant solder l’ensemble des droits des travailleurs, alors que cet argent était sensé payer les arriérés d’indemnités des ex-travailleurs de la SOTIBA  qui sont sans ressources, sans aucune autre source de revenus pouvant les permettre de prendre en charge leurs familles. Ces derniers, ne réclament, en effet, à l’homme d’affaires que 476 332 257 millions, représentant le reliquat de 40% de leurs indemnités. D’ailleurs, le tribunal régional hors classe de Dakar  a rendu  en 2010 une décision de justice condamnant  DOMITEXKA-Saloum et l’Etat du Sénégal à payer ce montant aux ex-employés.  

Suffisant pour les ex-travailleurs de la SOTIBA  pour qualifier le boss de CCBM  de « repreneur pas sérieux ». Cela d’autant plus qu’ils sont convaincus avec preuve à l’appui qu’il y a de «l’argent sorti du Trésor  public pour aider DOMITEXKA à ne pas sombrer et surtout pour régler quelques créances au premier rang desquelles le passif social ».  Pour entrer dans leurs droits, le collectif des ex-travailleurs de la SOTIBA a assigné  une nouvelle fois en justice l’Etat du Sénégal et Serigne  Mboup. Une nouvelle procédure pendante devant la justice. D’ici là beaucoup d’ex-travailleurs de la SOTIBA  ne seront plus de ce monde comme beaucoup d’autres qui sont déjà morts. «Il y a parmi nous, des retraités qui attendent de percevoir leurs droits pour aller en consultation, chaque jour  nous sommes sous la menace d’une expulsion par nos locataires, ceux qui ont des prêts bancaires ne peuvent  plus respecter les échéances », témoigne NDiouga Sokhna, le porte-parole du collectif. Des propos qui traduisent tout le drame social vécu par ces ex-travailleurs.

CRASH DE DOMITEXKA

Au même moment, DOMITEXKA est entré dans une nouvelle zone de turbulence. Et si rien n’est fait au sommet de l’Etat, l’entreprise va  inéluctablement vers un crash. Et pour cause,  après seulement un an d’activité Serigne Mboup a annoncé la cession d’activité de son entreprise qui fonctionnait jusqu’ici grâce à une partie du matériel de la SOTIBA transférée à Kahone. « Il y a urgence pour l’Etat de réagir s’il veut vraiment la relance de la filière textile. Nous pensons que la société DOMITEXKA est viable et a la capacité de recruter prés de 1500 emplois,  mais c’est le repreneur qui n’est pas à la hauteur. En trois ans, Serigne Mboup n’arrive pas à faire travailler 253 travailleurs »,fustige  Ndiouga  Sokhna, porte-parole des ex-travailleurs de la SOTIBA SIMPAFRIC. Son souhait est que les industries textiles soient la priorité dans le programme de relance des entreprises en difficulté que le gouvernement de Macky Sall a mis en place. Pour cela, il en appelle à l’arbitrage du chef de l’Etat. 

SOTIBA, VICTIME DE LA FRAUDE ?

La SOTIBA a été un des pionnières de l’industrie sénégalaise, à sa création en 1951. Très vite, elle connaît un développement fulgurant jusqu’en 1980, date à laquelle l’Etat du Sénégal décide  de sa nationalisation. Deux sénégalais, notamment Serigne Ndiaye Bouna et Tamsir  Mboup vont se succéder à la tête de l’entreprise, au début des années 90, au Marocain Mouhamed Mekouar, ancien ambassadeur de son pays à Dakar. Cette période coïncide également avec les difficultés de la société textile qui subie de plein fouet les conséquences néfastes de la fraude entre autres difficultés.  En effet,  la fraude textile, malgré tous les efforts et interpellations de la SOTIBA au niveau des autorités, continue de contrôler 100% du marché Wax et Lagos au Sénégal, dans des conditions qui mettent la SOTIBA hors jeu et l’empêche  depuis plusieurs années  de se développer. Ainsi, en 1993, l’entreprise connaît un premier «arrêt technique » de 18 mois liés aux problèmes d’écoulement des tissus. Elle reprendra en 1994 jusqu’en 2001. En ce moment, l’Etat avait trouvé un partenaire en la personne de Jacques Secondi, un homme d’affaires franco-indien. Il n’a pu relancer l’entreprise comme, il le voulait. De décembre 2001 à septembre 2002, l’usine sera en arrêt prolongé. Suite à cet  arrêt de ses activités une première restructuration   permettra à la SOTIBA de relancer ses activités de production entre  2003 et 2004 en vue  d’améliorer sa compétitivité , de régler  une grande partie  de ses dettes  et de  payer également  une partie de son passif .

Le protocole d’accord signé le 1er février 2007  entre l’entreprise dirigée à l’époque par Jean-Marc Secondi  et les délégués du personnel et qui marque le deuxième plan de relance constate avec regrets que «tous les objectifs de cette restructuration n’ont pas pu être atteints ». C’est ce qui va aboutir à la reprise de la SOTIBA et de la SOTEXKA par  Serigne Mboup en octobre 2010. Mamadou SARR

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