Une Margaret Thatcher sénégalaise
Le 1 er septembre dernier,
l'ancienne ministre de la Justice a inscrit une nouvelle page dans le roman de
sa vie en migrant vers la primature.
Depuis lors, une partie de la presse l’a affabulée du surnom de "Dame de
fer'' en référence à l'ancienne chef du gouvernement britannique disparue cette
année. Mais qui est cette ''Mimi''? Retour sur l'incroyable parcours du chef du
gouvernement.
Elle a le même caractère trempé et le même tempérament bagarreur que Magaret
Thatcher, Premier ministre britannique (1979-1990). Elles ont aussi comme dénominateur commun d'être nées au mois
d'octobre: le 12 octobre 1925 pour Mme Thatcher et le 13 octobre 1962 pour Mme
Touré. Entre les deux, 37 ans d'âge de différence. Elles ont eu à occuper les
mêmes fonctions de Premier ministre. Là s'arrête la comparaison? Non. Elles ont
le même charisme. Tout le monde reconnaît qu'elles sont:
intelligentes, déterminées, ambitieuses. Ce qui les rapproche davantage, c'est
qu'elles sont surtout des femmes à
poigne à qui on a donné le sobriquet de '' Dame de fer''. L'appellation
dérange, on ne sait pourquoi, certains proches du nouveau locataire du building
administratif.
Mais, on a du mal à croire que derrière cette grande dame mince, teint
noir, lèvres rougies, petits yeux rieurs , sourire avenant, se cache une ''
Dame de fer''.'' C'est injuste de
vouloir en faire une dame de fer. Elle incarne la fermeté dans un gant de
velours", rétorque une connaissance du chef du gouvernement qui tient à
rester anonyme. De passage il y a quelques jours à Gossas dans sa maison
familiale, Mimi a versé de chaudes larmes devant une assemblée médusée venue
l’a congratulée. A Dakar tout comme à Kaolack, elle a laissé l’image d’un garçon
manqué toujours en jean, t shirt et sa coiffe d’Angéla Davis. Mimi est fidèle
en amitié. Elle a horreur de la trahison. C’est aussi une femme très généreuse
mais elle ne gaspille pas son argent. Ce n’est pas la Sénégalaise qui va
déverser des billets d’argent sur les têtes des griottes. Méticuleuse et
ordonnée par contre elle a géré avec
courage les dossiers judiciaires explosifs à la Chancellerie, l'un des
ministères les plus exposés du début du règne de Macky Sall: Affaire de la traque des biens présumés mal acquis
pour laquelle Karim Wade, fils de l'ancien président Abdoulaye Wade et d'autres
grands dignitaires libéraux sont en prison; affaire Cheikh Béthio Thioune,
poursuivi pour le double meurtre de Médinatou Salam. Ensuite, il y a eu les dossiers
des journalistes : Cheikh Yérim Seck et Tamsir jupiter Ndiaye poursuivis
respectivement pour viol et actes contre nature (homosexualité), sans conter l'épineux
dossier Hussein Habré réfugié au Sénégal , depuis 1990 et poursuivi pour crimes
contre l'humanité. Ces dossiers ont fini par la révèler au grand public. Avec
le sentiment qu'elle menait, le combat de sa vie, Mimi Touré est montée
plusieurs fois au créneau pour croiser le fer contre les libéraux qui n'ont pas
ménagé leurs attaques contre elle. Ce n'est pas pour rien qu'elle a été le
ministre le plus médiatisé du gouvernement Abdoul Mbaye. Sans en être le
porte-parole, elle a souvent agi comme tel contre vents et marées. "
Fondamentalement , elle croit à la communication. Durant tout son parcours
professionnel, c'est quelqu'une qui a toujours parlé aux populations. Elle pense que toute entreprise
qui n'est pas comprise par les gens qu'elle sert est vouée à l'échec'', témoigne,
Ameth Dieng, un militant de l'Alliance pour la République qui la fréquente
depuis plus de trente ans.
MILITANTE PRECOCE
A 51 ans, elle est la deuxième
femme chef du gouvernement dans l'histoire politique du sénégal, après Mame
Madior Boye (2001-2002). Cette fille de médecin décédé, il y a quelques années
et d'une mère sage-femme qui est encore en vie, a vécu une enfance heureuse. mais, souvent
mouvementée, du fait des multiples déplacements de son père. c'est ainsi
qu'elle a débuté sa scolarité, à Tambacounda, avant de venir faire la 6 e au
lycée Gaston Berger de Kaolack. Dans la capitale du Saloum, contrairement aux
filles de son âge qui sont plus préoccupées à jouer au Roméo et
Juliette, l'adolescente de 14 ans découvre les idées de gauche et la politique.
"J'ai débuté mes activités politiques à l'âge de 14 ans à Kaolack, où, je
fus beaucoup influencée par mon
professeur d'histoire et de géographie, Ismaéla Diagne", confiait-elle
récemment à des journalistes. Elle a d'abord milité au Mouvement pour le
socialisme (MSU) de feu Mamadou Dia, ancien président du Conseil (Premier
ministre).
Ce militantisme précoce à gauche a développé chez elle son sens du leadership. Pour autant, cela ne
l'a pas empêchée d'être brillante à l'école où elle truste les premières
places. De retour à Dakar, où elle est née, ses parents l'inscrivent au lycée
Van Vollenhoven , devenu lycée Lamine Guèye de Dakar où est
scolarisé les enfants de l'élite de l'époque. En 1981, elle est lauréate du
prestigieux Concours général et décroche, la même année son baccalauréat. Elle
s'envole , alors pour Grenoble en France
pour des études en management d'entreprise, de droit et d'économie. Parallèlement
à ces études , elle milite dans les mouvements de gauche, notamment à la Ligue
communiste des travailleurs
(LCT). En France, toujours, elle fera la rencontre de son premier mari, Oumar Sarr , coordonnateur
du Parti démocratique sénégalais, (PDS) avec qui , elle a une fille, Dior,
diplômée en santé de l'université Yale.
De retour au Sénégal, elle débute sa carrière comme chargée de
marketing et de la communication à la Société des transport du Cap vert
(disparue). Parallèlement , elle continue son militantisme à gauche. Elle se
rapproche de Landing Savané dont, elle deviendra, la directrice de campagne à la
présidentielle de 1993. Puis, elle est recrutée à l'Association sénégalaise
pour le bien être familliale (ASBEF) comme chargée de programmes, en matière de
santé de la reproduction.
En 1995, elle débute une carrière dans le système des Nations unies qui
la conduira dans de nombreux africains comme le Burkina et la Côte d'Ivoire. Le
couronnement de cette brillante carrière
de fonctionnaire internationale sera un
poste de directrice des droits humains au siège du Fonds des Nations unies pour
la population (FNUAp), à New York. " Aprés 2003, je me suis concentré sur ma carrière onusienne à New York", soutenait-elle
dernièrement. Une carrière à laquelle ,
elle mettra volontairement un terme en 2010 pour soutenir le projet politique
de Macky Sall. Entre les deux, le courant est vite passé. D'ailleurs, le
candidat de la coalition Macky 2012 fera d'elle sa directrice de cabinet, pendant
cette période de braise. Là, elle a montré toute l'étendue de son talent de chef d'orchestre. car, la suite , on la
connaît.
Un bonheur ne venant jamais seul, Aminata Touré a convolé en troisième noce
avec un entrepreneur du bâtiment. Pour l'heure, même si elle défraie la
chronique médiatique par ses fonctions de ministre de la Justice et plus
récemment de Premier ministre, chose
rare dans le landerneau politique, elle tient à l'écart sa famille. Ses enfants
ne font pas la Une des pages people des journaux. Ces détracteurs lui prêtent d'autres
ambitions que le neuvième étage du bulding administratif. '' Ce n'est pas
quelqu'une qui cherche, le pouvoir pour le pouvoir. Ce qu'elle veut, c'est de
remettre le pays dans le sens du respect des droits humains et réussir sa mission'', tempère Ameth Dien
un de ses amis. Une chose est sûre, à 51 ans aucun homme ou femme politique n'a
pris sa retraite. Le roman de Mimi et le pouvoir ne fait que Commencer...
Mamadou SARR
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